SIX LOGEMENTS PARTICIPATIFS EN AUTOPROMOTION À ROMAINVILLE

LAURÉAT DU PRIX DE LA PREMIÈRE OEUVRE

> Maître d’Ouvrage : Les futurs habitants constitués en SCIA
> Maître d'Oeuvre : Atelier de l'Ourcq Architectes
> Programme et labels : 6 logements participatifs, RT 2012
> Surface : Terrain : 772 m2; SHAB privative : 573 m2 + 4x25 m2 de jardins ; SHAB collective : 68 m2 ; Jardins collectifs : 220 m2 (RDC) + 200 m2 (toit)
> Coût : 1,07 M€ HT
> Date de livraison : 2020

© Clément Guillaume

LE SITE 

La parcelle est une parcelle en drapeau, issue du découpage d’un ténement ayant servi de lieu de stockage pour des buses de VRD. Le contexte est celui d’une rue pavillonnaire calme qui suit la ligne de crête du plateau de Romainville, anciennement exploité comme carrière de gypse. La position en point haut permet au projet de révéler la géographie francilienne, tout en cherchant à dialoguer avec l’environnement pavillonnaire proche. 

LE PROGRAMME 

Le programme consiste en la construction de six logements participatifs en autopromotion, avec leurs espaces collectifs : une salle commune, une buanderie, un garage/atelier, deux jardins, un en pleine terre et un sur le toit. 

Le bâtiment sur rue comprend au rez-de-chaussée des espaces collectifs et un garage à vélo. Dans les étages, deux appartements sont superposés. Une buanderie et une salle commune donnent sur une terrasse et un jardin. Dans les appartements, les chambres donnent sur la rue et le salon sur le jardin. Le dernier niveau bénéficie d’une mezzanine sous les combles. 

Le bâtiment en fond de parcelle est desservi par une allée plantée. Il comprend quatre maisons en bande de 100 m² environ, qui sont configurées en duplex inversé, offrant lumière et vue pour les pièces de vie à l’étage ainsi qu’une ambiance plus tamisée pour les chambres. Au fond de l’allée, un studio/chambre d’ami/espace de travail partagé vient se glisser dans l’angle. 

Un jardin collectif est positionné à l’articulation entre les deux bâtiments. De là, un grand escalier métallique permet d’accéder à un autre jardin d’une superficie de 200m² situé sur le toit des maisons. 

LE PROJET COMME CÉLÉBRATION DE LA BANLIEUE ET DE SA GÉOGRAPHIE PHYSIQUE 

Le site est positionné sur la ligne de crête d’un des merlons du plateau de Belleville-Romainville. Un des objectifs fondamentaux du projet a été de mettre en valeur cette situation géographique exceptionnelle, et donc d’aller chercher de la hauteur et des vues. En duplex inversés, les maisons offrent à l’étage des pièces de vie de 3mètres de hauteur sous plafond et de très grandes baies vitrées donnant sur une vue dégagée. Ces baies vitrées en accordéons s’effacent quand on les ouvre, brouillant les limites entre intérieur et extérieur. 

Les chambres viennent se coller aux limites constructibles afin d’optimiser l’implantation sur la parcelle. Elles bénéficient d’un ensoleillement moins généreux mais disposent de petits jardins en prolongement. 

Ces considérations géographiques ont également imposé l’idée d’un toit jardin. Monter sur le toit c’est s’extraire de l’ultralocal de la parcelle et se retrouver plongé dans le grand territoire de la banlieue est. 

Depuis le toit se donnent à voir les collines du Raincy, les grands ensembles de Clichy-sous-Bois ou encore l’embranchement de l’A3 et de l’A86 : un enchevêtrement de formes et d’échelles qui caractérise le paysage de la banlieue. 

LE PROJET COMME CÉLÉBRATION DE LA BANLIEUE ET DE SA GÉOGRAPHIE URBAINE 

L’environnement est celui d’un tissu pavillonnaire assez typique, avec cette ambiance à la fois banale et très hétéroclite, pour lequel l’atelier de l’ourcq a une tendresse toute particulière. Le bâtiment sur rue, avec ses deux pentes, reprend le gabarit d’un pavillon lambda avec une échelle légèrement gonflée. Une familiarité avec le milieu est recherchée. La teinte s’harmonise avec celles des deux maisons avoisinantes et reprend le blanc pour les encadrements de fenêtre et les modénatures. 

D’autres éléments du projet sont plus exogènes, dans cet esprit de liberté formelle qui émane du tissu pavillonnaire. Le volume très vertical du premier bâtiment et les proportions étranges de ses ouvertures convoquent un imaginaire japonais. La grande grille repliable apporte des atmosphères sud-américaines. 

Le projet convoque aussi des références plus abstraites, plus modernistes et presque corbuséennes. C’est le cas avec ce grand escalier en console qui met en scène les déplacements. Aussi, la géométrie radicale du bloc des maisons contraste avec le caractère vernaculaire des alentours. 

De façon plus large le projet s’inscrit dans la dynamique de la densification pavillonnaire. L’opération fait de 670 m² de SDP. Elle est petite, mais complexe. Son échelle s’avère particulièrement adaptée ce type de programme en autopromotion. Le projet et son montage opérationnel peuvent s’envisager comme un modèle de développement urbain qui se ferait par de petits investisseurs et qui arriverait à se glisser dans le tissu existant sans trop le perturber. 

LE PROJET COMME CÉLÉBRATION DE LA BANLIEUE ET DE SA GÉOGRAPHIE HUMAINE 

Le troisième aspect de la géographie de la banlieue que le projet célèbre à sa manière est sa géographie humaine. Par son incomplétude, son caractère périphérique, la banlieue est aussi un espace de liberté, un lieu de possibles. Sans l’appui d’aucune collectivité, en parfaite autonomie, sans expérience préalable en matière de montage d’une opération immobilière, un groupe de personnes a souhaité prendre à bras le corps le problème de son logement. Il a souhaité le faire correspondre à un projet de vie où la dimension humaine et collective tient une grande place. Ce projet a demandé une énergie considérable de la part du groupe. Une centaine de réunions a été nécessaire. Chacun s’est investi à tous les niveaux du processus, en montant progressivement en compétence. Le groupe a fait une bonne partie des finitions. D’une part parce que le budget était extrêmement serré. D’autre part car à plusieurs, une énergie porte qui rend les choses moins insurmontables. 

L’enjeu principal de la conception a été d’organiser dans l’espace ce projet de vie en commun. L’objectif a été de trouver les moyens de vivre ensemble, mais séparément : donner des espaces et du souffle à la vie collective, mais aussi ménager la possibilité de s’extraire du groupe pour se reconstruire dans l’intimité. 

La salle commune et son prolongement en terrasse, est la polarité forte. C’est la place du village, accrochée aux flux quotidiens. C’est là où on se croise sans l’avoir prévu pour échanger deux mots, là où on se donne rendez-vous, là où on peut trouver de l’animation. La vie collective peut ainsi s’épanouir de façon naturelle et non programmé. 

Par ailleurs, le projet propose non pas un, mais plusieurs espaces partagés, disséminés sur la parcelle, qui permettent de se réunir en sous-groupe si nécessaire. Aucune pièce principale ne donne directement sur l’espace commun. La logique de phalanstère, totalement centripète, est soigneusement évitée. Il y a des échappées, des tangentes, des vues vers le lointain qui permettent de s’extraire des lieux. Le projet met en scène ces flux et cette animation avec le grand escalier. Il offre des vues croisées, des manières de s’interpeller ou d’échanger des regards. Ce mouvement et cette vie collective, participe à l’esthétique de l’ensemble. 

Quelle serait une esthétique participative de l’architecture ? Sans tomber dans les clichés, une surenchère d’effets ou de pseudopersonnalisations ? La réponse ici a été de proposer une structure vivante, souple. L’expression architecturale est finalement assez sommaire, presque fruste. Mais elle est là pour être poursuivie, pour être enrichie par de nouveaux projets collectifs. Aujourd’hui, ces projets qui consistent à actualiser en permanence l’architecture, à faire vivre les espaces dans leurs usages mais aussi dans leur matérialité, à la rendre à jamais incomplète, c’est ce qui continue à cimenter le groupe, ce qui lui donne une raison d’être ensemble au-delà de la convivialité ou de l’entraide quotidienne.

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